Les tribulations de la métaphysique en France au début du XIXe siècle
Bernard Baertschi  1@  
1 : Université de Genève  -  Site web

Dès le tout début du XIXe siècle, Destutt de Tracy se demande quel nom donner à la "philosophie première": il écarte deux dénominations qu'il juge inappropriées: métaphysique et psychologie au profit de idéologie, c'est-à-dire "science des idées". Le débat n'est pas neuf et remonte en tout cas à Condillac, qui opposait la bonne et la mauvaise métaphysique – la mauvaise étant celle qui se propose de percer la nature des choses. Sur ce point, l'accord est large et Charles Bonnet, qui emploie volontiers le vocable psychologie, précise aussi que la nature des choses échappe à cette science.

L'accord est si large que le jeune Biran y souscrit; il reproche simplement à ses devanciers, et particulièrement à Tracy, de n'avoir développé qu'une idéologie objective, ignorant l'idéologie subjective, à savoir la science du sujet pensant, qui est la véritable philosophie première. Plus tard, il préférera la désigner sous le terme psychologie. Parallèlement, et en partie suite à la lecture de Leibniz et à la découverte de la pensée de Kant, il opérera une certaine réhabilitation de la métaphysique classique, car il est selon lui nécessaire d'ancrer la science des idées dans une réalité faite d'êtres ou de noumènes.

Ce débat sur la bonne manière de nommer la philosophie première est révélateur de la façon dont la philosophie elle-même est conçue. Les Lumières française, sous l'influence de Locke et de Condillac en ont proposé une interprétation qui, en définitive, sera rejetée par Maine de Biran, ce qui, pour un temps au mois, clora le débat.


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